Et si nous redonnions, un nouveau souffle à nos chorales, un
nouvel élan tout empreint de vigueur, de fraîcheur et de jeunesse, non pour
elle même afin de devenir " de belles chorales ", mais
pour être l’expression d’une Église qui chante !
« La divine parole, lorsqu’elle s’élève dans le chant, non seulement
révèle la vérité à l’intelligence, mais encore répand l’amour dans le cœur
de celui qui loue. »
Père André Gouzes - Abbaye de Sylvanès,
ci-contre à gauche de Roland
La chorale
paroissiale est un service d'Église
Une chorale liturgique, contrairement à ses consœurs
(profanes) n’existe pas pour elle-même. Elle n'est ni un dérivatif, ni une
occupation de loisir plus ou moins marginale pour personne, certes de bonnes volontés,
mais dont ce serait le « truc » ou le « dada »... Une chorale liturgique
est un service d’Église, une Diaconie, nous dit le concile «
Dont la
fonction ministérielle au cœur du culte divin, est d’introduire et de
porter l’assemblée des fidèles, dans sa participation active au Mystère
Eucharistique. ».
Oui, un service liturgique, auquel sont conviées toutes les personnes de
Bonnes Volontés, gratifiées de ce qu’il est convenu d’appeler une belle
voix... mais pas seulement, car ce qui fait " le corps d’une
chorale " ce ne sont pas ces voix d’exception
(même s’il est toujours préférable d’en
compter quelques unes dans ses pupitres) mais
l’ensemble de toutes les autres voix,
justes, c’est évident,
mais disons communes, à la plupart d’entre nous, pourvu qu’on ait un tant
soit peu d’oreille, qu’on aime chanter et ce... même si on ne connaît pas
la musique.
La
raison d'être d'une chorale
Le rôle et la mission d’une chorale dans le cadre d’une
liturgie, n’est pas de donner un concert, fut-il spirituel et de très
haute tenue, mais (je cite Vatican II) « Par la beauté des chants
choisis, d’introduire et de porter l’assemblée des fidèles, dans sa
participation active, au Saint Sacrifice de la Messe ».
Pour bien
comprendre
Prenons conscience que nous ne venons pas à la messe pour « l’entendre » comme on disait
autrefois, ni pour y assister de façon passive, mais pour y participer de
façon active, en étant attentif à la Parole, pour nous en nourrir et la
faire nôtre, pour qu'elle passe dans nos vies. Nous venons à la messe pour
nous offrir nous mêmes, comme coparticipants au sacrifice du Christ, pour
la Rédemption du monde.
Alors, conscients de cette mission et mus par l’Esprit Saint, nous pouvons
nous avancer pour recevoir la Sainte Eucharistie, ce Pain de Vie,
qui
n’est pas un dessert pour enfants sages,
mais un viatique pour combattants, où, sous les apparences du pain, se
cachent non seulement le Corps, mais aussi le Sang, l’Âme et la Divinité
de notre Seigneur Jésus-Christ.
Loin donc, d’être une action secondaire ou facultative, c’est à une
véritable diaconie propre à ce Mystère, qu’est conviée une chorale, et par
là même toutes les personnes qui la constituent.
Le chant
choral nous éveille à la vie
La musique, mais essentiellement le chant,
nous éveille à la conscience gratuite de la vie, quelle soit heureuse ou
douloureuse. Il appartient à la manifestation de l’exister, à son
jaillissement pur, même dans le désespoir. C’est pourquoi, il doit y avoir
de la hauteur, de la verticalité dans nos chants liturgiques, pour que le
cœur découvre la Présence, de Celui avec qui il vient dialoguer.
La
charité s'exprime aussi par le chant
Pour nos frères isolés, seuls, perdus dans l’anonymat, empreints à la
tristesse, découragés souvent, le chant de nos assemblées doit faire son
feu de la moindre brindille perdue de nos vies et, comme la
Cananéenne
(Marc 7, 24-30)
faire un repas, de la plus humble des miettes tombées de la table du
festin ou comme
Bartimée
(Marc 10 , 46-53) plongé dans la nuit de sa foi, qui crie
son espérance : « Jésus fils de David, aie pitié de moi !
» - Et que chantons-nous donc, sinon cela, dans nos prières pénitentielles
!...
L'annonce de l’Évangile
par le chant choral
Toute la tradition biblique, a vu comme une secrète complicité, une
mystérieuse appartenance, entre la vie intérieure et le chant, comme s’il
était sa langue la plus naturelle.
« Et si le chant (s’interrogeait un jour André Gouzes dans
une de ses homélies) âme, souffle et sang mêlés, était la plus
haute, la plus large, la plus commune tradition spirituelle du
christianisme ! »
Du reste, depuis quelques années, un peu partout, beaucoup pensent que le
renouveau spirituel et communautaire de
l’Église,
sa joyeuse annonce de la Bonne Nouvelle, passe par le renouveau de la
liturgie.
D'ailleurs, chaque grande époque de la mystique et de la spiritualité
chrétienne, a eu chaque fois, le génie d’une expression musicale, qui a su
en faire l’instrument privilégié de son rayonnement. Pensons à
Grégoire
le Grand, ce réformateur émérite de la liturgie du 6ème siècle, avec
la musique qui porte son nom : le Grégorien. Plus près de nous,
pensons à des noms prestigieux comme Palestrina, Roland de Lassus,
Bach, Delalande et combien d’autres !
Mais nous sommes au 3ème millénaire. Le pèlerinage
de l’Église de ce temps est devant nous et pas derrière, et les pages
qui qu'écrivent depuis plus de 20 ans, des auteurs inspirés comme Lucien
Deiss, Joseph Gélineau (qui fut l’un des pionniers), ou Décha,
André Gouzes ou Jacques Berthier, pour ne citer qu’eux, s’inscrivent
assurément dans cette quête d’un nouveau mode d’expression du culte divin.
Chanter, c'est
aimer
St. Augustin
(ci-contre, avec Ste Monique sa mère), commentant inlassablement
les psaumes qu’il aimait, ose même dire que « Chanter et aimer, ne sont qu’une seule et même chose » « Amantis est cantare » = Chanter, c’est
aimer ! - ce qui veut dire que par nature, chanter est le propre de
ceux qui s'aiment.
C’est à travers les psaumes, les chants secrets de
son amour pour Israël, que Dieu confia à David (le doux
chantre d'Israël),
la mémoire vive de ses merveilles. Et ces psaumes sont devenus le chant de
l’Église.
Par eux, l’Église nous fait expérimenter la foi,
comme un état de chant - dynamisme intérieur et spirituel, pulsations en
nous de Sa joie.
Par le chant, avec et dans le chant, nous devenons :
Temple de l'Esprit Saint. Voilà, ce que révèle en nous la prière chantée, quelle soit solitaire ou liturgique.
" Glorifiez Dieu jusque dans votre corps
»
st Paul (1 Corinthiens
6, 19-20)
Voilà pourquoi, la célébration chrétienne, poème achevé lorsqu’elle est
bien célébrée, ne s’accomplit pleinement que dans le chant, comme toutes
prières, qu'elles soient :
Eucharistique, Anamnèse
ou Mémorial… parce que c'est le chant qui
exprime le mieux l’esprit d’incarnation. Il ne fait qu’un avec le
sensible, et s’offre à l’intuition d’un Au-delà sans mesure, qui ne prend
forme que par la voix et l’amour.
Certes, tout se chante et tout chant est unique, mais :
pour que nos liturgies retrouvent toute la vivacité d’expression de leur
authenticité,
pour que par la beauté, nos liturgies attirent, témoignent et portent à
la prière,
pour que nous exprimions notre vérité de Chrétiens en la chantant,
il est impératif que les pratiquants se mobilisent et s'investissent
pour ce service d'Église, car en ces temps où le
fanatisme fait si peur, c’est assurément le moyen le plus désarmé
d’annoncer la « Joyeuse nouvelle de l’Évangile » que d'en faire
d’abord entendre le chant et en aimer la voix, pour en reconnaître la
Parole et en comprendre le discours.
Roland SCHEUÏR
De Charles DELHEZ
" Prière de la chorale
"
ici
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