L'Agneau
de Dieu
----------------------------------------------------------------------------------------------
Chant de la fraction du pain

" Agneau
de Dieu "...Que signifie ce
terme ?
Cette image de l'Agneau renvoie au témoignage que Jean-Baptiste rendit à
Jésus le jour de son baptême (Jn 1,29). On la retrouve aussi dans le passage
d'Isaïe qui a trait au quatrième chant du Serviteur. Celui-ci est comparé à
un agneau que l'on mène à l'abattoir (Is 53,7). Elle est aussi présente dans
la première épître de Pierre : " Vous avez été racheté par un sang
précieux comme celui d'un agneau sans reproche et sans tache, le Christ
" (1 P 1,18-19). Cet Agneau est enfin celui qui est présent dans
l'Apocalypse : " Alors j'ai vu l'Agneau debout sur la montagne de Sion et
avec lui les cent quarante-quatre mille qui portent, inscrits sur leur front, le
nom de l'Agneau et celui de son Père "
(Ap 14,1).
Toute cette symbolique de l'Agneau
vient " jouer " avec celle que porte en lui le geste du partage du
pain : " Pain rompu pour un monde nouveau ", celui qu'annonce la fin
de l'Apocalypse (Ap 21). Pain qui va être donné en partage aux invités des
noces de l'Agneau. Corps brisé pour être mangé par tous les invités au
banquet de l'Alliance nouvelle pour qu'ils deviennent le Corps mystique du
Christ ressuscité (1 Co, 10,17). Avoir part au même pain, c'est reconnaître
que le Christ est venu nous sauver du péché et qu'il nous rétablit dans
l'amour du Père. " Voici l'Agneau de Dieu qui enlève le péché du
monde ! ".
La
fraction du pain...
Ce terme désignait dans les Actes des Apôtres (Ac 2, 42) et dans les
premières communautés chrétiennes, ce qui est aujourd'hui notre eucharistie.
Rompre le pain en effet, le geste même du Christ, celui auquel les disciples le
reconnaissent à l'auberge d'Emmaüs. Cet acte est bien plus qu'un simple
partage, il signifie la vie du Christ donnée pour l'homme, il exprime que le
corps du Christ, rompu au moment de l'eucharistie, est aussi le corps du Christ
rompu sur la croix.
Pour
des raisons pratiques, ce geste est devenu presque insignifiant au fil des
siècles. Le pain n'a plus été rompu pour chacun, mais remplacé par des
hosties, du pain prédécoupé. Le rite de la fraction a pourtant subsisté, et
nous l'avons redécouvert avec la réforme liturgique.
Il participe au
déploiement symbolique du dernier repas de Jésus :
- il
prit le pain :
présentation des
dons,
- il
rendit grâce :
prière
eucharistique,
- il
le rompit :
fraction du
pain,
- et
le donna à ses disciples :
communion.
La
Présentation Générale du Missel Romain précise : " Ce rite n'a pas
tellement un motif pratique, mais il signifie que nous, qui sommes nombreux, en
communiant à l'unique pain de vie, qui est le Christ, nous devenons un seul
corps " (P.G.M.R. n° 56c).
Dans le
Missel Romain il est spécifié que ce geste de la fraction du pain est
accompagné par le chant de l'Agneau de Dieu. L'usage a limité à trois le
nombre d'invocations, mais le Missel ajoute : "
Cette invocation
peut être répétée autant de fois que c'est nécessaire pour accompagner la
fraction du pain. La dernière fois, elle est conclue par les mots : donne-nous
la paix. " (PGMR n° 56e). C'est bien là un chant rituel, qui
accompagne le rite en train de s'accomplir.
Plusieurs
écueils...
Malgré l'insistance des revues et des
formations liturgiques depuis des années, ce geste de la fraction du pain ne
constitue pas encore un moment essentiel de nos liturgies. La prière
eucharistique et la consécration demeurent des sommets de la célébration, et
à juste titre. Il est d'ailleurs à noter que, lorsque le pain est rompu au
moment de la consécration par certains prêtres (ce qui n'est pas du tout dans
l'ordre symbolique prévu), des personnes sont sensibles à ce geste parce qu'il
se situe à un moment où l'attention est maximale. La fraction du pain se
situe, elle, après le geste de paix qui a dispersé l'attention. L'assemblée
doit se concentrer de nouveau sur ce qui se passe à l'autel, alors qu'on est en
train de chanter. Le chant rituel au lieu de souligner l'action liturgique,
risque souvent de l'occulter.
L'autre
écueil est le télescopage du geste de paix et de la fraction du pain. Quand on
veut insister sur cette dimension de la relation fraternelle signifiée par le
geste de paix, on choisit quelquefois, pour ce moment de la célébration, un
chant qui parle de paix, et comme on ne peut pas le chanter pendant le geste de
paix, on le chante pendant la fraction du pain. Il y a alors une distorsion de
sens. Jésus, Agneau de Dieu, est bien celui qui donne la paix : c'est le texte
de la dernière invocation. Mais la fraction du pain, reconnaissance de la
présence de Jésus ressuscité dans ce pain partagé, ne saurait se réduire à
cette dimension.
Il
vaudrait mieux que le chant de paix accompagne le geste qu'il veut souligner. Le
jour où l'on souhaite insister sur cette dimension de l'eucharistie, on pourra
déployer davantage le geste de paix. Comme cela se pratique dans certaines
assemblées, le président peut donner la paix aux laïcs qui sont dans le
chœur, aux servants de messe, qui vont à leur tour porter la paix reçue de
Dieu à l'assemblée. Un chant pour la paix prend ici tout son sens. ensuite, la
fraction du pain est accompagnée par l'Agneau de
Dieu, qui sera bien sûr plus
bref, pour éviter la multiplication des chants dans ce court moment.
De
nouveaux Agneau de Dieu...
Depuis quelques années, des auteurs et
des compositeurs nous ont proposé des Agneau de Dieu développés, qui
soulignent chacun un aspect différent du mystère de l'eucharistie. On peut
citer les plus connus : l'Agneau de Dieu de la Petite
Messe (AL 179), qui
reprend la très ancienne prière de la Didachè où l'on rappelle que le pain
est fait des multiples grains disséminés sur les collines, comme le peuple de
Dieu se rassemble en un même corps, ou encore
Agneau de Dieu, agneau
vainqueur (A 221), qui s'inspire de l'Apocalypse, et qui évoque la
victoire
du Christ sur la mort.
Il est important
que le chant de l'Agneau de Dieu soit choisi en cohérence avec le temps
liturgique.
Des
gestes signifiants...
Le plus bel Agneau de Dieu ne remplira pas
sa mission si le geste de la fraction du pain est escamoté. Il faut que
l'ensemble du rite soit cohérent. Le geste de paix étant achevé, le
président procède à la fraction du pain, de manière visible, de préférence
avec une très grande hostie. Il répartit les autres hosties dans différentes
coupes.
L'Agneau de Dieu
accompagne
ce geste
: il ne commence pas trop tôt et ne se chante pas pour meubler un
vide.
D'autres
chants pour la fraction du pain...
Il semble qu'il soit aussi intéressant de
retenir, de manière exceptionnelle, un autre chant pour accompagner la fraction
du pain. Celui-ci pourra réveiller ce rite. Un chant tel que
Pain rompu pour
un monde nouveau, pourra bien faire comprendre le sens de ce moment.
Certains chants se prêtent bien à une double utilisation : on les chantera
avant et pendant la communion. cette manière de faire ne devra pas être
habituelle : on dispose aujourd'hui d'un tel répertoire d'Agneau de Dieu qu'il
serait dommage de ne pas l'exploiter.
Il
serait intéressant que tous les intervenants de la célébration prennent le
temps de réfléchir à une meilleure mise en oeuvre de ce rite, accompagné du
chant, qui reste souvent le parent pauvre de nos célébrations. Alors qu'on
soigne, et de plus en plus, la présentation des dons, la prière eucharistique
et ses acclamations, la fraction du pain, dans laquelle nous reconnaissons la
présence du Christ vivant, mérite de retrouver toute sa signification.
|