église des Avanchers...
En Savoie, État indépendant jusqu'en 1860, l'art baroque apparaît dans le courant du XVIIe siècle. L'art baroque religieux est le fruit d'une rencontre entre l'Église romaine du XVIe siècle et l'art tel qu'il se manifeste à ce moment précis. En effet, au lendemain de la Réforme luthérienne, l'Église, en proie à de nombreuses difficultés tant dogmatiques que d'organisation, réunit un grand concile à Trente en Italie. Pour en savoir plus, cliquer sur l'angelot. |
...petite église Baroque de Savoie-Tarentaise
n° 13 |
La fin de l'hiver annonçait un printemps encore bien frileux. La neige lentement commençait à disparaître, l'après-midi touchait à sa fin. Avant de regagner le gîte, nous fîmes une dernière promenade qui nous conduisit à la petite église baroque des Avanchers. |
Après avoir gravi quelques marches rustiques, nous fîmes le tour de l'édifice et à tout hasard, je poussai la porte, persuadée qu'elle serait fermée, comme le sont souvent les églises aujourd'hui.
n° 28/ |
n° 28/5 |
n° 28/6 |
cognosco oves meas
" Je connais mes brebis " n° 28/7 |
La première surprise de la porte qui s'ouvrit fit place à une deuxième : cette petite église, si sobre et presque triste de l'extérieur, comme pour préserver son secret, éblouissait le visiteur dès la porte franchie. Dès cet instant, nous laissâmes agir en nous la globalité du décors et cette savante alchimie voulue par les créateurs, destinée à toucher l'âme aussi bien que les sens. Prenons le temps de nous imprégner de l'esprit de ce lieu.
n° 29/1 |
n° 29/2 |
L'édifice le plus simple comporte une nef unique rythmée par des piliers latéraux délimitant les travées et encadrant les autels secondaires. Le choeur profond, accueille le retable de l'autel majeur qui remplit trois fonctions étroitement liées : tenir lieu de somptueux écrin au tabernacle où sont entreposées les hosties consacrées, suggérer l'éclatante beauté du monde céleste, enseigner par sa symbolique et les personnages qui le peuplent, les principaux éléments du dogme chrétien.
n° 30 |
Le retable demande bien évidemment, un peu de temps pour être déchiffré. Il s'organise dans la hauteur en deux ou trois registres ; dans la largeur en un à trois volets. Les registres sont séparés par des corniches, des entablements plus ou moins généreusement pourvus de décrochements, de ruptures de ligne, de ressauts accentuant l'effet recherché de relief, de mouvement, l'une des caractéristiques fondamentales de l'art baroque. |
n° 31/1 |
Parfois surmonté d'un attique, petit retable sommital en miniature (détail ci-dessous),
ils conduisent l'esprit, par degrés, à se détacher de la terre, figurée par des motifs végétaux, pour conduire à Dieu le Père près de la voûte. |
Ces différents degrés soulignent la hiérarchie ascendante des personnages représentés sur le retable : de simples mortels parfois dans la partie inférieure du tableau central, puis des évêques, des saints, apôtres, évangélistes, martyrs, des anges ou angelots sur les corniches du registre supérieur et enfin le Père éternel !
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Le tableau central, qui peut être peint ou sculpté met généralement en scène le saint patron de la paroisse à qui l'église est consacrée. Situé dans l'axe du retable au niveau du premier registre, il est parfois partiellement masqué par le tabernacle, témoignant ainsi de quelque remaniement intervenu au cours du temps. |
Le tabernacle (tabernaculum, tente), placé au centre de l'autel, constitue le " saint des saints ". Conçu architecturalement comme un temple en miniature pour rappeler les origines testamentaires, il est sans aucun doute l'élément qui concentre sur lui la plus grande attention décorative et reçoit le travail le plus soigné. La volonté de le magnifier s'affirmait de façon d'autant plus impérative que le dogme de la présence réelle du corps du Christ, représentait le point de divergence essentiel entre réformés et catholiques.
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n° 32/2 |
Je
ne pus résister à la tentation de grimper jusqu'à la tribune dans l'espoir
secret d'y trouver un orgue, si petit soit-il. Sans être étonnée, je fus un
peu déçue de n'y trouver que des bancs destinés à accueillir
la chorale où les fidèles, en remplacement de l'orgue inexistant.
J'en profitai pour prendre quelques clichés du choeur et de son retable, vus de
haut.
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Outre l'autel et le retable, un certain nombre de meubles servant ou ayant servi à l'exercice du culte arrêtent le regard et suscite l'intérêt ou la curiosité. La poutre de gloire (je ne l'ai pas aperçue dans cette église) : équivalent occidental de l'arc de triomphe en Orient, située à la hauteur du départ de la voûte, elle marque l'entrée du choeur. Les tables de communion : généralement constituées de balustres de bois, elles supportent " une table " au pied de laquelle le fidèle se présente pour participer au sacrifice eucharistique en communiant.
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Les chaires, bien qu'aujourd'hui sans utilité liturgique, ces loges dans lesquelles les desservants montaient prêcher, témoignent dans bon nombre d'églises, de l'époque où le prédicateur devait être vu et entendu (sans renfort de micro) par l'ensemble des fidèles. Elles sont formées d'une cuve cylindrique ou polygonale, que surmonte un abat-voix. |
Outre le retable majeur, des autels dits secondaires nous rappellent les moments importants de la vie des Saintes et Saints.
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L'orfèvrerie et le vêtements liturgiques complètent ce mobilier qui conférait aux cérémonies emplies de chants et d'encens, un caractère festif d'une puissance émotionnelle que nous avons beaucoup de mal à imaginer aujourd'hui. |
n° 36 |
Dans le milieu du XVIè siècle et dans le courant du XVIIè, les papes soucieux d'embellir Rome et de magnifier la puissance de l'Église, décident de laisser libre cours à l'imagination créatrice des artistes et d'encourager l'ornement, la sculpture, la peinture, dans un esprit de clarté et de lisibilité de l'image afin d'être compris par tous. |
Ainsi, la voûte de l'église des
Avanchers nous montre par ces peintures richement colorées, les quatre évangélistes et
leur animal symbolique.
(Pour en savoir plus sur leur
symbolique, consulter la rubrique "
Musique et Liturgie " en page
d'accueil.
Jean |
Luc |
Marc |
Matthieu |
En Savoie-Tarentaise, les églises baroques, dans leur architecture et leur mobilier, présentent une certaine uniformité. La quasi-totalité a été reconstruite aux XVIIè et XVIIIè siècle selon un plan presque identique : église halle, souvent à trois nefs et ne se distinguant des maisons environnante du village que par les dimensions, l'immense toit et le clocher. Distinction entre profane et sacré, l'église domine souvent par son implantation surélevée, légèrement à l'écart du village. Les clochers des vallées savoyardes, souvent d'origine romane, présentent une assez grande diversité d'aspect en relation avec l'histoire locale. En Tarentaise, s'est développé un type de clocher métallique avec charpente en bois et couverture en fer blanc à structure plus ou moins complexe.
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L'Art Baroque
vrai catéchisme visuel
...Au cours de ce concile dont les sessions s'échelonnent de 1545 à 1563, une vaste remise en ordre est opérée, qui doit permettre aux évêques de reprendre en main leurs diocèses face à l'avancée du protestantisme. Cette reprise en main sera soutenue par le recours à toutes les formes artistiques avec la double mission de séduire et d'enseigner. Au XVIe siècle, l'art " à la mode " est un art nouveau en rupture avec le classicisme trop figé pour exprimer les tensions, les désordres et toute l'effervescence intellectuelle, scientifique, politique du temps. Ce nouveau style, plus tard appelé " Art baroque ", trouve grâce aux yeux des princes de l'Église qui l'adoptent et multiplient les commandes aux architectes, sculpteurs et peintres. C'est ainsi qu'au XVIIe siècle, l'on voit fleurir en Savoie avec la reconstruction des églises, des centaines de retables dorés ou polychromes où s'épanouissent des nuées d'angelots, où fleurit la colonne torse inspirée de celles du baldaquin de Saint-Pierre de Rome du Chevalier Bernin. La profusion du décor, l'usage immodéré des ors des couleurs des jeux de lumière, des lignes courbes, la saturation de l'espace, le mouvement, caractérisent cet art nouveau chargé de préfigurer la beauté du Paradis. Il illumine les églises et chapelles savoyardes comme les églises bâties par les jésuites aux quatre coins de l'ancien et du nouveau monde pour exprimer la puissance de l'Église et porter son message rénové. Dans les hautes vallées de Savoie où le bois abonde, ce matériau remplacera le marbre italien fournissant ainsi aux sculpteurs Valsésians ou Mauriennais, l'occasion de s'illustrer pour l'édification des fidèles... et pour notre plaisir. L'art baroque est paradoxe. II marie en ses discours le merveilleux et le tragique, la souffrance et la joie, l'éphémère et l'éternel. Il sollicite la raison pour mieux la déstabiliser et faire place à l'émotion avec laquelle il communique plus directement. Sur plus de 500 kilomètres dans les vallées de Maurienne, Tarentaise, Beaufortain Val d'Arly, les églises baroques dessinent un chemin de lumière dont les feux témoignent d'une foi solide et inventive mais aussi d'un art qui a su mettre l'illusion au service de l'essentiel. |